L'état civil est établi pour assurer la constatation et la sauvegarde des droits privés d'une personne ou pour prouver d'une manière authentique un événement dont dépend l'état d'une personne. "Les officiers de l'état civil sont les autorités désignées par la loi pour recevoir, conserver les actes de l'état civil et délivrer les copies ou extraits auxquels elles confèrent l'authenticité" (Ministère de la justice, Instruction générale relative à l'état civil du 11 mai 1999). Dans la limite du territoire communal, la fonction d'officier de l'état civil peut être exercée par le maire et les adjoints, le conseiller municipal délégué, un agent communal délégué. La tenue des registres de l'état civil implique un certain nombre d'obligations : inscrire tous les actes reçus ; transcrire certains actes reçus par d'autres officiers publics (les officiers des trois armées, les agents diplomatiques français ou étrangers, etc.) ; transcrire le dispositif de certains jugements ; apposer les mentions en marge des actes. L'officier de l'état civil exerce ses fonctions sous le contrôle et la surveillance du parquet territorialement compétent. Le procureur de la République peut lui donner des directives.
Pour comprendre l'origine et la composition des fonds de l'état civil versés aux archives départementales par les institutions judiciaires, il est utile de faire un bref historique des registres paroissiaux et de l'état civil.
Ancien régime
La tenue régulière de registres de baptême apparaît d'abord comme une préoccupation de l'autorité ecclésiastique avant de devenir celle des autorités civiles. En Bretagne, ce souci se manifeste dès 1408. Au cours d'un synode assemblé à La Roche-Bernard, l'évêque de Nantes prescrit aux recteurs de son diocèse de dresser régulièrement de tels registres. Dans le Morbihan, quelques communes conservent encore des registres de baptême antérieurs à l'ordonnance de Villers-Cotterêts : Beignon (1502), Bignan (1531), Bréhan (1536), La Trinité-Porhoët (1507), Le Faouët (1535), Ménéac (1538), Pleugriffet (1537), Ploërmel (1538), Rieux (1523), Saint-Léry (1520), Taupont (1519).
En 1539, François Ier signe l'ordonnance de Villers-Cotterêts qui prescrit notamment la tenue d'un registre de baptême dans chaque paroisse ("[..] par l'extrait dudit registre se pourra prouver le temps de majorité ou minorité et fera pleine fois à cette fin"). Le registre doit être déposé chaque année au greffe du bailli ou sénéchal le plus proche, pour y être gardé et y avoir recours. En 1579, l'ordonnance de Blois (en réponse aux doléances exprimées lors des états généraux de Blois au sujet des mariages clandestins) préconise l'enregistrement des mariages et des sépultures. Dans le Morbihan, une dizaine de paroisses anticipent cette mesure avec des actes de sépulture dès les années 1540 (Beignon, Caro, Guer, La Trinité-Porhoët, Lanouée, Ménéac, Saint-Léry, Tréhorenteuc) et des actes de mariage en 1567 à La Trinité-Porhoët, en 1570 à Beignon, en 1577 à Rieux ; néanmoins, la majorité de ces registres est établie de 1620 à 1650.
De façon générale, ces prescriptions étant peu ou mal appliquées, elles sont reprises dans l'ordonnance de Saint-Germain-en-Laye en avril 1667, aussi appelée Code Louis : les recteurs doivent tenir chaque année deux registres (ouverts, cotés et paraphés par le juge royal dont dépend la paroisse) où sont consignés ensemble dans l'ordre chronologique les actes de baptême, mariage et sépulture ; la minute, signée, doit demeurer dans la paroisse tandis que la copie authentique, ou grosse, doit être déposée au greffe du bailliage ou de la sénéchaussée. Les frais de constitution et de copie sont assurés par la fabrique paroissiale. En 1674, l'utilisation de papier timbré est rendue obligatoire pour l'enregistrement des actes reçus par les officiers publics.
C'est à partir de la déclaration royale du 9 octobre 1736 que les registres sont établis en double minute, les deux actes étant rédigés simultanément pour être « réputés tous deux authentiques », signés du recteur, des témoins et des parties. L'article 14 de la déclaration prescrit en outre d'appliquer les mêmes dispositions aux églises succursales ou trèves ; ainsi, des actes ont été portés en double, sur les registres de la paroisse et sur ceux de la trève ; pour les trèves ne disposant pas de registres spéciaux, les actes sont inscrits sur les registres de la paroisse dont elles dépendent. Cette disposition est diversement appliquée dans le Morbihan.
Enfin, un arrêt du Conseil du Roi daté de 1746 introduit la tenue de registres distincts, l'un pour les baptêmes et les mariages, le second pour les sépultures, celui-ci devant être communiqué aux contrôleurs des domaines pour la vérification des déclarations de mutation par décès.
Une ordonnance de 1716, suivie d'un règlement de 1728 dictent l'enregistrement des décès des militaires et des marins : en temps de guerre, un registre est tenu par le major de chaque régiment et visé par le secrétaire d'État à la guerre ; en mer, le registre est tenu par un aumônier, légalisé par le juge de l'amirauté du port d'attache.
Après que la révocation de l'édit de Nantes, le 18 octobre 1685, ait supprimé l'état civil protestant, l'édit de pacification de 1787 sur les non catholiques les autorise à faire enregistrer en double exemplaire les naissances, mariages et décès par les recteurs ou les officiers de justice. De tels cahiers existent pour la commune de Lorient, en 1787-1789 ; ils renferment des déclarations de sépultures pour les étrangers décédés accidentellement en ville (matelots, négociants).
Depuis la Révolution
En 1790, l'Assemblée constituante nationalise les biens du clergé, dissout un certain nombre d'ordres religieux et vote la constitution civile du clergé : les diocèses et les paroisses sont remodelés sur la base de nouvelles circonscriptions administratives ; les évêques, curés et vicaires sont élus par les citoyens actifs et sont rémunérés par l'État, devenant ainsi de simples fonctionnaires ; chaque prêtre doit prêter un serment de fidélité à l'État. Dès 1791, le pape Pie VI condamne la constitution civile du clergé. Il interdit aux fidèles de s'adresser aux prêtres assermentés et leur demande de faire constater leur état civil par les officiers de justice.
Le décret-loi du 20 septembre 1792 laïcise l'état civil en confiant la tenue des registres de naissance, mariage et décès aux autorités municipales sous le contrôle de l'administration départementale. Le maire devient l'officier d'état civil ; il doit rédiger les actes en double. Un registre est gardé en mairie, le second est déposé au greffe du tribunal. Les registres fournis aux communes sont cotés et paraphés par les autorités du district. L'acte de naissance est dressé dans les vingt-quatre heures suivant la déclaration de l'enfant à la maison commune. Le mariage donne lieu à une publication (au minimum huit jours à l'avance). L'acte de décès est dressé dans les vingt-quatre heures après la constatation sur place par l'officier.
Le décret-loi prévoit également que les grosses ou copies, établies par les recteurs depuis 1667 et déposées au greffe des juridictions royales soient « transportées et déposées aux archives des départements » (titre VI, art. 4). Une circulaire du ministère de l'Intérieur du 6 août 1817 prescrit leur transfert aux tribunaux d'instance pour faire rectifier les registres contenant des irrégularités et pour remplacer par des copies faites sur les doubles existants ceux qui auraient été détruits ou perdus. Se trouvent ainsi regroupés les « grosses » antérieures à 1792, les doubles de l'état civil moderne et les tables décennales depuis 1792. Quant aux « minutes », elles sont transférées aux archives de la commune (depuis, certaines communes ont déposé tout ou partie de leur collection aux archives départementales, en application de la loi du 21 décembre 1970 rendant ce dépôt obligatoire pour les communes de moins de 2000 habitants ; cette collection constitue la sous-série 3 E).
Généralisant une pratique développée par certains recteurs ou officiers de justice au cours du XVIIIesiècle (tables annuelles des baptêmes, mariages et sépultures, à Lorient, Plouay, Sarzeau par exemple), la loi prévoit aussi la confection par les maires de deux tables annuelles et leur refonte tous les dix ans en tables décennales sur un registre séparé, un exemplaire devant être remis au Directoire du département. Dans le Morbihan, un nombre important de communes (*) rédige ces premières tables pour la décennie 1793-1802. Néanmoins, les collections des tables décennales ne sont réellement complètes qu'à partir de 1802, un décret du 20 juillet 1807 ayant prescrit leur établissement en trois exemplaires par les greffiers à partir du dernier jour complémentaire de l'an X (21 septembre 1802) : le premier exemplaire pour le greffe du tribunal de première instance, le deuxième pour la préfecture et le troisième pour la mairie. Les tables doivent distinguer les naissances, les mariages et les divorces, les décès. Un décret du 1er janvier 1910 décide de revenir à deux expéditions (pour le greffe et pour la commune) et prescrit l'inscription des patronymes dans un ordre alphabétique rigoureux en faisant apparaître les femmes sous leur nom de jeune fille, et aussi, le cas échéant, au nom de leur mari. Depuis le décret du 3 mars 1951, la rédaction des tables décennales est de nouveau confiée aux maires.
Les actes de mariage rédigés entre le 1er vendémiaire an VII (22 septembre 1798) et le 7 thermidor an VIII (26 juillet 1800) ne sont pas enregistrés dans la commune mais au chef-lieu de la municipalité de canton (nouvelle unité politique et administrative créée en remplacement du district).
Une circulaire de 1897 rend obligatoire l'inscription de mentions marginales sur les registres : date de naissance en marge de l'acte de mariage ou de divorce, renseignements rectificatifs d'état civil. Puis, l'ordonnance du 29 mars 1945 prescrit la transcription des décès en marge des actes de naissance.
Depuis la loi du 13 janvier 1989, le greffe n'est plus tenu de porter les mentions marginales sur l'exemplaire des registres de l'état civil conservé au tribunal de grande instance.
(*) Arzon, Baden, Baud, Belz, Berné, Bignan, Billiers, Brandérion, Brech, Bréhan, Camoël, Carnac, Cléguer, Cléguérec, Croixanvec (cotée 6 M 1122), Erdeven, Gestel, Gourhel, Gourin, Guégon, Guémené-sur-Scorff, Guénin, Guern, Guidel, Guiscriff, Hennebont, Kergrist, Kervignac, La Grée-Saint-Laurent, La Trinité-Porhoët, Langoëlan, Langonnet, Lanouée, Lanvaudan, Lanvénégen, Lauzach, Le Faouët, Le Guerno, Le Palais, Le Saint, Limerzel, Locmalo, Locmaria, Locminé, Locoal, Mendon, Loyat, Malansac, Malestroit, Malguénac, Melrand, Meslan, Mohon, Moréac, Moustoir-Ac, Muzillac, Naizin, Neulliac, Nostang, Noyal-Muzillac, Noyal-Pontivy, Péaule, Persquen, Plœmel, Plœmeur, Ploërmel, Plougoumelen, Plouray, Pluherlin, Plumelin, Pluvigner, Pontivy, Priziac, Questembert, Quéven, Remungol, Riantec, Rochefort-en-Terre, Ruffiac, Saint-Aignan, Saint-Allouestre, Saint-Brieuc-de-Mauron, Saint-Caradec-Trégomel, Saint-Dolay, Saint-Gildas-de-Rhuys, Saint-Gonnery, Saint-Gravé, Saint-Nolff, Saint-Tugdual, Saint-Vincent-sur-Oust, Sarzeau, Sauzon, Séglien, Séné, Silfiac, Taupont, Theix, Treffléan, Vannes.